02/12/2025

Trésors cachés : les œuvres d’art sacré de l’église Saint-Léger à Château-Larcher

Une église médiévale au cœur du village

Située sur la place centrale du bourg, l’église Saint-Léger de Château-Larcher veille sur le village depuis près de mille ans. Classée monument historique depuis 1913, elle témoigne d’une histoire mouvementée, marquée tant par la foi locale que par les vicissitudes du temps (Source : Base Mérimée). Pourtant, ce que l’on remarque au-delà de ses solides murs romans, ce sont les œuvres d’art sacré qu’elle abrite, patiemment conservées d’une génération à l’autre. Certaines sont discrètes, d’autres plus imposantes, mais toutes racontent à leur façon la spiritualité et les sociétés du Sud-Vienne.

Les grandes œuvres sculptées de Saint-Léger

La statue de Saint Léger

  • Date : Fin du XVe ou début XVIe siècle
  • Matériau : Calcaire sculpté et polychrome
  • Description : Elle représente l’évêque martyr Léger, patron de l’église, en habits épiscopaux, tenant une crosse d’une main et, dans certaines anciennes représentations, la palme du martyr. Endommagée durant la Révolution, elle fut restaurée au XIXe siècle et conserve encore des traces de polychromies d’origine, atténuées par le temps.
  • Position : En surplomb du chœur, elle est couramment fleurie lors des fêtes patronales.
  • Anecdote : La tradition orale raconte que la statue, lors d’une crue exceptionnelle du Clain au XVIIe siècle, aurait été transportée en procession jusqu’à la digue pour protéger le village.

Un Christ en Croix du XVIIIe siècle

  • Matériau : Bois sculpté – traces de dorure
  • Source : Inventaire général du patrimoine culturel, 1983
  • Description : Un Christ dit “de mission” aux bras grands ouverts, expressif, témoignant de la piété populaire d’époque. Son réalisme frappant illustre une sensibilité religieuse post-tridentine, insistante sur la souffrance et la rédemption.
  • Particularité : Installé lors des grandes missions paroissiales du XVIIIe, puis déplacé à l’emplacement actuel en 1901.

Peintures et retables : entre dévotion et histoire locale

Retable majeur du XIXe siècle

  • Origine : Ateliers locaux, circonscription de Montmorillon
  • Composition : Bois peint, dorures, petits éléments rapportés en stuc
  • Description : Ce retable néoclassique en trois parties épouse la courbe de l’abside. Il fut offert en 1857 par la confrérie locale de Saint-Léger lors de la réfection du chœur, pour célébrer la paix retrouvée après les troubles révolutionnaires.
  • Décor :
    • Panneau central : représentation de la Cène, inspirée de la tradition des maîtres mi-septentrionaux.
    • Latéraux : scènes de la vie du saint.
  • Témoignage : Selon une lettre conservée aux archives départementales, les artisans reçurent jusqu’à douze pieds de bois de hêtre provenant du parc du château, ce qui souligne le lien entre le patrimoine ecclésial et l’histoire seigneuriale locale.

Tableau du Sacré-Cœur (fin XIXe)

  • Technique : Huile sur toile
  • Dimension : 120 x 70 cm
  • Description : Reproduction d’un modèle en vogue sous le pontificat de Pie IX, ce tableau fut commandé par un notable du village en 1895 à la suite d’une mission mariale. L’inscription latine “Ego sum via, veritas et vita” est peinte au bas du cadre.
  • Curiosité : Un ex-voto en nacre est fixé sur le montant, pratique encore vivante chez les habitants jusque dans les années 1960.

Statuaire populaire et objets de piété locale

Vierge à l’Enfant (XIXe siècle)

  • Matériau : Plâtre polychrome
  • Provenance : Atelier Ducrocq, Limoges
  • Description : La statue mesure près de 80 cm et étonne par la délicatesse de l’exécution, notamment au niveau du drapé du manteau bleu céleste. Si le style est courant dans la région, cette pièce fut commandée lors d’une mission paroissiale en 1876 et offerte par les conscrits du village.
  • Fait marquant : En 1944, des habitants y déposèrent un foulard en remerciement de la préservation du village lors de la Libération.

Sainte Radegonde

  • Matériau : Bois peint
  • Datation : Probablement début XIXe
  • Raison de la présence : Culte régional très fort à Sainte Radegonde, notamment contre la fièvre et les maladies infantiles. Chaque année au mois d’août, une prière était récitée à son intention dans l’église, coutume attestée jusque dans les années 1950.

Objets liturgiques remarquables

  • Châsse-reliquaire néogothique (vers 1870)
    • Matière : Bois doré à la feuille et panneaux vitrés
    • Utilisation : Conservait autrefois une relique attribuée à saint Léger. La châsse ne sort plus que lors des cérémonies solennelles tous les dix ans.
    • Inventaire : Signalée dans les registres de 1882.
  • Croix de procession en cuivre argenté (XVIIIe siècle)
    • Détail : Ornée d’ornements floraux gravés, elle apparaît notamment lors de la procession du lundi de Pâques, coutume toujours maintenue aujourd’hui.
  • Calice Louis XV en argent (1742)
    • Gravure : Les armes de la famille du seigneur d’alors, les Ribérac, ornent le pied.
    • Contexte : Il fut caché durant la Révolution dans une grange du quartier de la Tuilerie et ne retrouva l’église qu’en 1802.

Polychromies murales et inscriptions anciennes

  • Décor roman : Des fragments de fresques du XIIe siècle subsistent dans la travée du chœur, notamment une mandorle stylisée et des rinceaux végétaux. Ces éléments sont visibles lors des Journées du Patrimoine ou sur simple demande à la mairie.
  • Graffitis historiques : Datant du XVIIIe siècle, ils consistent en inscriptions de conscrits ou de dates de sépultures, visibles sur les bancs en pierre près de la porte sud.

Témoins de la vie religieuse et collective

À Château-Larcher, les œuvres d’art sacré ne sont pas de simples reliques patrimoniales. Elles incarnent un lien continu entre générations, reflets muets des grandes heures comme des épreuves du village. Elles participent encore, à leur façon, à la vie paroissiale moderne, que ce soit lors des fêtes votives, des messes anniversaires ou des visites de scolaires (Source : Association des Amis de Château-Larcher).

  • La majorité des pièces évoquées sont répertoriées dans la Base Palissy, l’inventaire du Ministère de la Culture.
  • Certains objets, comme l’ancien reliquaire ou le calice, ont été inventoriés lors des campagnes de restauration post-1999.

Découvrir ces trésors : conseils et anecdotes de visite

  • L’église est ouverte régulièrement en journée ; pour découvrir les objets non directement visibles (châsse, ornements), il est conseillé de passer par la mairie ou lors d’une visite guidée estivale.
  • Durant la fête votive de septembre, des habitants exposent parfois des photographies d’anciennes processions ou de messes d’action de grâce, qui permettent de voir certains objets “en situation”.
  • Un livret d’accompagnement, disponible à l’entrée, détaille l’origine de chaque œuvre avec anecdotes et légendes associées.

Plus loin, regarder le patrimoine comme un récit vivant

Les œuvres d’art sacré de l’église de Château-Larcher, loin de n’être que des vestiges silencieux, révèlent à qui sait les observer le tissu dense des liens locaux : dons d’artisan, mémoire d’événements heureux ou tragiques, gestes de foi partagés. La mosaïque d’objets, de sculptures et de peintures ouvre une fenêtre sur une culture villageoise soudée et inventive, où patrimoine et modernité, ruralité et Histoire dialoguent quotidiennement.

Pour celles et ceux qui souhaitent approfondir : n’hésitez pas à consulter les fiches de la Base Palissy ou à interroger les habitants lors des visites, car la mémoire orale complète souvent ce que l’œil ne voit pas. L’église de Château-Larcher ne se livre jamais tout à fait au premier regard – c’est une invitation, encore et toujours, à vivre et découvrir autrement.

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