08/07/2025

Château-Larcher : un château témoin de mille ans d’histoire

Aux origines du château : de la forteresse à la résidence féodale

L’histoire du château débute au tournant du XI siècle, une période marquée par les luttes territoriales et l’édification de nombreuses places fortes dans le Poitou. Selon l’Abbé Aubrun (chateau-larcher.fr), la première mention connue du château remonte à 1060, alors qu’il est déjà le siège d’une seigneurie appartenant à la puissante famille de Larcher. Son rôle d’alors : contrôler la route entre Poitiers et Charroux, voie stratégique pour le commerce et les pèlerinages.

  • Organisation primitive : Un donjon circulaire, des murailles en pierre calcaire, des fossés, une basse-cour où se déployaient granges et logis.
  • Contextes féodaux : À la fin du XI siècle, Château-Larcher fait figure de point d’ancrage du pouvoir local, jouant alternativement la carte de l’alliance ou de la résistance face aux comtes de Poitiers.

Le roman de la construction médiévale se devine encore aujourd’hui dans les vestiges : les bases du donjon, les portions de l’enceinte initiale, la porterie du XII siècle et la chapelle castrale dédiée à Sainte-Catherine.

Les guerres de Cent Ans : destructions et reconstructions

Du XIV au XVe siècle, la Guerre de Cent Ans bouleverse le paysage du Poitou. Château-Larcher n’est pas épargné : en 1356, après la bataille de Poitiers, le château est pris par les troupes anglaises, inquiets du potentiel militaire du site (source : Monuments Historiques, ministère de la Culture).

  • Conséquences immédiates : Le château, partiellement rasé, est réinvesti par les Français dès la reprise du contrôle régional. Les archives mentionnent plusieurs campagnes de rénovation autour de 1380, financées par d’importantes levées de deniers.
  • Transformation architecturale : Durant cette période, le site s’adapte : murailles renforcées, tours de guet rondes, creusement d’un puits en pleine enceinte, attestant l’importance des sièges dans la vie quotidienne.

Fait marquant : la "Maison du Gouverneur", couverte d’ardoises, demeure l’un des rares témoins des aménagements réalisés après la Guerre de Cent Ans. Les grandes salles voutées, aujourd’hui à ciel ouvert, accueillaient alors banquets et réunions de vassaux.

Du bastion militaire à la demeure de plaisance : le tournant de la Renaissance

L’arrivée de la paix, dès la fin du XVe siècle, transforme le château. Moins nécessité d’en faire un bastion, il devient une résidence aristocratique. Un changement incarné par l’agrandissement du logis seigneurial et l’ouverture de fenêtres à meneaux — détail typique de la Renaissance poitevine.

  1. Amplification du confort : Installation de cheminées monumentales, aménagement des cuisines et amélioration des accès aux jardins qui s’étendaient sur la basse-cour.
  2. Lavitations artistiques : Des graffitis d’époque, gravés par les occupants sur la pierre calcaire, sont encore visibles dans certaines tours ! Un clin d’œil immédiat à la vie quotidienne renaissante.

À la veille de la Révolution, Château-Larcher a tout d’un petit joyau provincial, envié pour la beauté de sa chapelle (reconstruite partiellement au XVII siècle) et pour les grandes fêtes qui animaient les abords du bourg : danses, joutes, foires, documentées par des archives paroissiales consultables aux Archives départementales de la Vienne.

Épreuves, déclins et renaissance : les XVIII et XIX siècles

La période moderne n’est pas tendre pour le vieux château. Saisi comme bien national à la Révolution, démantelé en partie, il sert de carrière de pierres – pratique courante, qui explique la disparition d’une grande partie des murailles extérieures (source : « Le patrimoine des communes de la Vienne », Flohic éditions).

  • Destruction : 1792 : abattage des portes, dispersion des armoiries, démolition du pont-levis.
  • Réutilisation : Les pierres taillées, transportées à dos d’âne ou de charrette, servent à construire de nouvelles maisons dans le village. Aujourd’hui, il n’est pas rare de trouver, dans les murs du centre-bourg, un linteau ou une pierre de taille ancienne « revenant » du château.

Cependant, le XIX siècle voit naître une nouvelle sensibilité patrimoniale : sous l’impulsion de l’archéologue local Eugène Turpin, des relevés et croquis sont réalisés. Il contribue, par correspondance avec Mérimée (alors Inspecteur général des Monuments historiques), à classer une partie du site.

Le XX siècle : préservation, tourisme et vie de village

Entré dans le siècle dernier à l’état de "romantique ruine", comme le disaient les guides de l’époque, le château investit désormais l’imaginaire collectif. Dès les années 1930, les premières cartes postales reproduisent ses grandes arches et l’étonnante silhouette du donjon tronqué.

  • 1927 : Classement du donjon et de la chapelle comme Monuments historiques.
  • Depuis 1983 : campagnes successives de consolidation, souvent menées avec l’aide de bénévoles du village et du Conseil départemental.

Aujourd’hui encore, de nombreux événements animent ses abords : marché médiéval, concerts d’été, reconstitutions historiques. Un clin d’œil à l’époque où la basse-cour résonnait des chants et des rires lors de foires et de fêtes du village. Les habitants jouent un rôle-clé, via notamment l’association « Site Historique de Château-Larcher », pilier de la sensibilisation auprès des scolaires comme des touristes (chateau-larcher.fr).

Quelques secrets du château : anecdotes et détails à ne pas manquer

  • Sur le mur nord du logis, plusieurs "marques de tâcherons", signatures des tailleurs de pierre du Moyen Âge, offrent une lecture fascinante du savoir-faire des bâtisseurs. Certains motifs reviennent sur d’autres sites du Sud-Vienne…
  • La chapelle castrale, dédiée aujourd’hui encore, accueille chaque septembre la traditionnelle fête de Sainte-Catherine, souvenir paroissial remontant au Moyen Âge.
  • Un souterrain relierait, selon la légende (jamais vérifiée), le château à la Mothe de Valence, plus au nord. Les recherches archéologiques n’en ont jamais percé le mystère, mais l’histoire anime toujours les veillées du village.

Une mémoire en mouvement : le château dans la vie locale

Au fil des siècles, le château a su passer de la forteresse redoutée à un lieu de rencontres et de transmission. Ses pierres, certes érodées, irriguent encore l’imaginaire et l’identité du village : chaque fête médiévale, chaque atelier du patrimoine dans la vieille salle d’armes, prolonge le dialogue entre passé et présent.

Sa valorisation actuelle illustre à la fois la résilience de la communauté et l’attention portée à ce patrimoine « vivant ». Grâce à l’engagement des habitants, à la mobilisation des associations, à la passion des enfants en visite scolaire, Château-Larcher fait la démonstration qu’un monument n’est jamais figé : il évolue, se raconte et se vit au rythme des générations.

Sources : chateau-larcher.fr, Inventaire général du patrimoine culturel (Région Nouvelle-Aquitaine), « Le patrimoine des communes de la Vienne » (Flohic éditions), Ministère de la Culture (Monuments Historiques), Archives départementales de la Vienne.

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